Tranquille, Sigurd se fichait pas mal de là où il atterirait - après tout, le chapeau est censé ne pas répartir au hasard non ?
Très satisfait, c'était probablement la maison qui lui parlait le plus (et aspirait le plus à la tranquilité). Même si du coup, ça renforçait encore plus le côté "intello" que certains de ses amis lui donnaient.
- L'arrivée à Poudlard pour la première fois. Avant ça, il n'avait jamais été au contact de la magie - autant dire que tout l'impressionna. Le train, les balais volants, les sorts et toutes les possibilités qu'ils offrent, même les familiers lui semblaient incroyables ! (et, bonus : il a pleuré comme une madeleine au moment de la remise des diplômes en dernière année - ce qui n'est pas dans ses habitudes)
- Sa rencontre avec Malone en 4ème année, jeune serdaigle qui devint vite un de ses meilleurs amis. Rencontre qui lui fut plus que bénéfique puisqu'il s'avère que la mère de Malone tenait un salon de coiffure dans le Chemin de Traverse depuis quelques années. Elle lui apprit quelques techniques et, plus tard lorsqu'il fut diplômé, l'accepta comme employé où il travaille encore actuellement.
Je pense que vous le savez déjà : coiffeur. C'était son rêve depuis tout petit, et si l'apparition de la magie chez lui (et les insistances de sa mère) a retardé ses plans, il n'y a pas renoncé.
Il a fait partie des Renards - les étudiants opposants à The Crow au sein de Poudlard - et il en est encore aujourd'hui assez fier, même s'il n'a pas l'impression d'avoir contribué plus que cela à son arrestation. Pour une personne comme lui qui a tendance à se tenir à l'écart des choses, s'impliquer de la sorte était quelque chose de nouveau et ce geste représentait déjà beaucoup.
Quelques jours après son arrivée à Poudlard, peu après un de ses premiers cours de magie : il a fait cracher des limaces à son prof en appliquant bêtement les conseils d'un "ami" à lui pour s'entraîner ("T'inquiète, à cette distance ça ne le touchera pas !").
Cet environnement propice à l'apprentissage et au partage de connaissances lui ont permis de se familiariser assez vite avec la magie. Il a probablement fait moins le "fifou" (c'est-à-dire : privilégier les fêtes aux devoirs) que s'il s'était retrouvé dans une autre maison ; à la place, il a su trouver un certain équilibre entre sa vie sociale (parce que faut pas déconner non plus) et ses études.
Il a eu le DEMA en Arts Magiques pour faire plaisir à sa mère et, même s'il ne l'aurait pas fait si ça n'avait tenu qu'à lui, il a apprécié suivre les enseignements et prolonger un peu ses années d'études (et de fêtes).
« Oooooh mais c'est géant !!! » Sigurd Knudsen, 5 ans.
Il mettait, pour la première fois de sa vie, les pieds à Torshávn, capitale des îles Féroé. Du haut de ses treize mille habitants, c'était la plus grande ville de l'archipel.
Tout ce qu'avait connu Sigurd avant ça, c'était le calme de son village natal, Sandavágur, sa plage de sable, son église au toit rouge et sa maison surmontée d'herbe. Et ses moutons.
Même le pire des insomniaques n'en viendrait pas à bout : ces cinquante mille charmants mammifères dominaient l'île. Ils étaient absolument partout.
« Wooooh y'a plein de magasins !!! » Sigurd, dans le centre commercial de la ville doté d'une douzaine de boutiques et un supermarché.
A cet âge-là, le petit Sigurd avait pour occupations l'observation de moutons, le dessin de moutons (il était passé maître en la matière) et, en été, les jeux sur la plage avec ses amis lorsque le temps était clément. C'est-à-dire, lorsque la température atteignait la dizaine de degrés et que les nuages se décidaient à ne pas pleurer pour la journée.
Vous comprendrez donc qu'aller à « la grande ville » était pour lui comme se rendre à Disneyland.
Ses parents le suivaient, dans le petit port aux maisons colorées, d'un air amusé et bienveillant. Sa mère, féroïenne pure souche, et son père, d'origine danoise, s'occupaient de la petite épicerie de Sandavágur. Leur fils était leur trésor, leur petit rayon de soleil quotidien.
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« Mais je ne veux pas partir, maman ! » Sigurd Knudsen, 10 ans.
Tout naturellement, sa mère plaçait de grands espoirs en lui : elle voulait qu'il réussisse dans la vie. Qu'il ait un bon métier, qu'il trouve une fille bien, qu'il se marie, qu'il aie des enfants. Tout naturellement, elle voulait qu'il soit heureux. Et pour cela, tout naturellement, il faudra qu'il aille étudier à l'étranger, quand il sera plus grand. Après tout, c'était beaucoup plus valorisant, sur un CV.
Aveuglée par sa propre idée du bonheur, elle ne s'est jamais demandé si c'était vraiment ce que souhaitait son fils.
Leur discussion s'était portée sur le futur de Sigurd, et ce qu'il entendit ne lui fit pas plaisir. Du tout. Il aimait l'idée d'aller ailleurs, certes, mais juste pour une petite période de temps - une, deux semaines, un mois à la limite. Il aimait là où il était, et l'enfant sentait qu'il n'aurait jamais aucune envie de partir. Maintenant et même plus tard.
De toute façon, il voulait être coiffeur. Il pourrait bien apprendre le métier auprès du professionnel du coin, non ? Celui-ci le connaissait déjà bien et lui avait promis de lui enseigner quelques trucs quand "il serait plus grand". Alors pour lui c'était clair, son avenir était déjà tracé.
Mais sa mère venait de tout balayer du revers de la main avec un simple « ce n'est pas un métier sérieux ».
Il aurait pu pleurer, crier, bouder. Mais Sigurd fut raisonnable. Il l'était toujours. Il l'était trop. Il est parfois nécessaire de s'imposer, de mettre en avant ses propres sentiments plutôt que ceux des autres. Mais le petit Sigurd ne le savait pas. Alors, raisonnablement, il encaissa et retourna, raisonnablement, à son soixante-troisième dessin de mouton. Il avait commencé une fresque murale ; il avait pour projet de recouvrir tout un mur de la chambre de sa sœur qui était née un an plus tôt.
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« ... » Sigurd Knudsen, 11 ans.
Sur le pas de la porte de la maison familiale, Sigurd restait planté là, interdit. Il ne pouvait avancer. Il ne voulait pas partir. Pas comme ça. Il voulait rester ici, avec ses parents, avec sa soeur, avec ses amis, avec ses moutons, avec le vieux coiffeur qui allait être son mentor - avec son passé et ce qui aurait dû être son avenir.
Mais ses gênes en avaient décidé autrement.
Poudlard.
A ce nom, sa mère eut des étoiles dans les yeux, son père un air de profond dégoût.
Parce que, Sigurd l'apprit à ce moment-là, son grand-père paternel fut lui aussi un sorcier. Et il n'avait clairement pas été le genre de papa modèle dont tout le monde rêve. Sigurd ne sut jamais les détails - c'était tabou dans la famille, même sa mère ne savait pratiquement rien -, mais son père semblait en avoir tiré une haine immense des sorciers. Sigurd l'apprit à ses dépends.
Le comportement de son père changea. Lui qui était si affectueux se fit distant, jusqu'à éviter ne serait-ce qu'un contact visuel avec son fils. On aurait dit qu'il avait peur. On aurait dit qu'il ne reconnaissait plus son propre fils. Et c'était ça, en fait. Son fils, un sorcier ? Une de ces choses pouvant faire exploser leur maison d'un claquement de doigt ? Ces êtres défiant toute logique ? Ils n'étaient pas humains, et ne pensaient pas comme tels. Il était sous le choc.
Et il eut peur. Peur que sa fille aussi devienne comme ça.
Il en parla à sa femme ; Sigurd l'entendit. L'entendit, mais ne réussit jamais à le digérer complètement. Il en pleura des nuits entières ; en parla à sa mère, qui ne pouvait rien faire - elle en discutait sans cesse avec son mari, mais celui-ci ne semblait pas réussir à changer d'avis.
C'est sur cette ambiance ma foi fort joyeuse que Sigurd quitta la maison familiale et rejoignit Poudlard.
Il se fit des amis, se familiarisa avec la magie, Poudlard, et tout ce qui concernait cet univers qu'il ne connaissait absolument pas. Et il s'y plu, vraiment. Malgré l'ombre que représentait ses parents, il était heureux.
Il rentrait chez lui de temps en temps, évidemment. Sa mère lui posait des questions sur ses études, sa soeur sur la magie. Son père ne lui disait rien, jamais. Il semblait le juger constamment. Leurs interactions se limitaient au strict minimum.
Et Sigurd, raisonnable, ne s'en plaignait jamais.
Mais ça allait s'arranger, un jour. Il voulait y croire.
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« T'es trop un génie, mec ! »
Malone s'admire dans la glace, encore et encore. Sigurd vient de commencer à travailler à plein temps dans le salon de coiffure de la mère de celui-ci. Malone, c'est un des meilleurs amis de Sigurd : ils se sont rencontrés durant leurs années d'études à Poudlard et sont restés très proches (bon, après, ça ne fait même pas un an qu'ils étaient diplômés).
Si, au beau milieu du Chemin de Traverse, on pouvait s'attendre à ce qu'un salon de coiffure use et abuse de la magie pour proposer des coiffures toujours plus extravagantes... Eh bien c'était le cas de celui-ci. Mais Sigurd mettait un point d'honneur à minimiser ses appels à la magie. Il a grandi sans et trop s'en servir lui fait perdre toute satisfaction du travail bien fait.
« C'est toujours un plaisir de t'écouter déblatérer mille et une infos qui ne me serviront jamais. Tu es bien parti pour rejoindre le Club des Commères Magiques, tu le sais ça ?
- Evidemment, tu sais bien que c'est mon rêve depuis toujours ! »
Echange de regards, petits ricanements. Heureusement qu'il n'y avait personne à cette heure-ci, on les aurait sacrément dévisagés. La vie dans le monde magique lui plaisait bien, à Sigurd. Il avait trouvé ses marques, bien qu'il continuait à s'émerveiller régulièrement pour "un rien" (selon les autres) dans ce quotidien magique.
Ses affaires de famille le poursuivaient toujours, cependant. Il avait hésité à rentrer définitivement, à reprendre le salon de coiffure du voisin comme prévu. Mais il fallait reconnaître qu'il se plaisait dans le monde magique. Et surtout, il n'avait pas à affronter sa famille. Cet été, il était allé leur rendre visite mais avait fait un peu l'autruche. Il n'avait pas encore osé annoncer à sa mère qu'il était devenu coiffeur à plein temps. Il n'avait pas encore osé briser la glace avec son père. Mais voilà, le temps passe et il devra bien leur faire face un jour ou l'autre...
- Sigurd est né aux Îles Féroé loin de toute foule et animation,
- On lui a révélé qu'il avait des gênes de sorcier à ses 11 ans (du côté de son père), le forçant à quitter son pays pour rejoindre Poudlard, à contre-coeur,
- Sa mère rêve qu'il fasse une prestigieuse carrière, son père ne lui parle plus depuis qu'il a appris qu'il était sorcier,
- Il finit par beaucoup se plaire là-bas et il a choisi de poursuivre sa carrière dans le monde magique, pour cette raison mais surtout pour ne pas affronter ses parents.